Comment assurez-vous le pilotage de cette combinaison ?
La cohérence des trois perspectives long terme, moyen terme et court terme est la condition de notre efficience. Une révision mensuelle des plans associés nous garantit que nous nous plaçons dans les meilleures conditions pour réaliser nos objectifs.
Le processus de pilotage de ces trois boucles permanentes s’appelle Sales & Operations Planning (S&OP). Nous l'avons mis en place depuis quatre ans. Les granularités s’affinent mois après mois pour aborder la phase de production avec les meilleures chances de succès. Le plan d’investissement, le plan d’achats, le plan de production, le plan d’amélioration de la qualité ou encore le plan de transport s’imbriquent de plus en plus finement.
Le S&OP est animé par l’équipe Supply Chain et fourni les plans de marche aux acteurs opérationnels : achats, production, contrôle qualité, logistique.
C'est un processus de décision périodique et collaboratif au cours duquel l’entreprise établit un consensus entre des objectifs de ventes ou de distribution, des objectifs financiers et des capacités internes de réalisation de l'entreprise.
Où situez-vous les principaux challenges à relever ?
Notre process de fabrication est complexe, avec un temps de traversée de presque une année pour les productions les plus critiques. Il est donc bien certain que l’anticipation juste a été et continuera d'être la clé pour éviter tout dérapage de délai ou de coût.
Nous devons maintenant passer d’une situation où le développement produit est au cœur de nos préoccupations à une organisation dont la stabilité et la reproductibilité du système de production mobilisent toutes les attentions. Pour dire les choses autrement, notre pilotage doit désormais basculer d’une logique inspirée par la capacité à démontrer la validité de notre concept à une logique de fourniture de nos clients.
La sécurisation de la supply chain représente de ce point de vue un défi d’amélioration continue, avec le besoin de simplifier et d’accélérer pour permettre la montée en capacité, dans une logique de lean management.
Quels seront les marqueurs de votre succès ?
Rationaliser, c’est par exemple augmenter la taille des lots de 5 000 à 30 000 ou 40 000 unités. Il est facile d’imaginer qu’il est plus rapide de libérer un lot de 40 000 unités que 8 lots de 5 000. Il y a, pour une qualité identique moins de prélèvements et de contrôles destructifs à effectuer. C’est aussi une adaptation des ressources au plus juste.
Un autre axe d’amélioration concerne les modalités mêmes de contrôles. Il nous faut passer d’un mode de contrôle renforcé, souvent redondant, associé à un processus de développement, à un mode de contrôle juste, effectué en continu et par délégation chez nos partenaires.
Notre plateforme ZENEO®, quoique mono-produit aux composants standardisés, peut encore faire l’objet de réflexions qui conduisent à simplifier les opérations.
Une dimension importante de notre effort de stabilisation à des volumes toujours plus conséquents est la digitalisation. En particulier, nous sommes en train d’avancer sur la digitalisation de notre documentation qualité. Avec en perspective un dossier de lot 100 % électronique.
Il y a aussi bien sûr un enjeu de management derrière cette transformation, en quittant la figure du héros pour adopter une posture beaucoup plus rationnelle et pragmatique. Nous passons à la production industrielle en continu.
Charley Michaux
De quoi sera faite votre année 2023 ?
La sécurisation de la supply chain constitue le fil conducteur de la stratégie achats de Crossject. Hier, et jusqu’à aujourd’hui, il fallait obtenir de nos fournisseurs une qualité stabilisée qui nous permette de fiabiliser notre plateforme ZENEO®. Demain, en conservant notre confiance à nos partenaires historiques qui portent avec nous cette aventure depuis 20 ans, il faudra que nous sachions ajouter la compétitivité économique et la volumétrie aux engagements qualité pour accompagner notre entrée en phase de vie série. C’est notre feuille de route pour 2023.
Nous avons fait le choix historique, contrairement à une tradition solidement ancrée dans la fonction achats, de ne pas procéder par double sourcing, sauf pour un tout petit nombre de composants totalement critiques. En échange de notre acceptation d’une forme de fidélité exclusive à l’égard de nos partenaires de rang 1, nous avons bâti avec eux un contrat de vigilance très renforcée.
Sur quelles bases repose ce contrat de confiance ?
Ce contrat est fondé sur un pilotage contraignant en six thématiques :
- Des indicateurs financiers, notamment le suivi du taux de dépendance et une notation de l’entreprise par un organisme tiers.
- Des indicateurs d’assurance qualité, monitorés pour chaque composant fourni par le partenaire.
- Des indicateurs sur la solidité contractuelle, avec pour objectif de disposer à terme de 100 % de contrats initiés par nos services juridiques. C’est déjà le cas pour la majorité d’entre eux. En particulier, nous imposons pour chaque composant un Plan de Continuité d’Activité Composant (PCAC), qui passe en revue l’ensemble des risques et la façon dont notre partenaire s’engage à en prévenir les impacts.
- Des indicateurs dédiés aux outillages, dont le maintien opérationnel conditionne évidemment la capacité de nos fournisseurs à honorer leurs livraisons, avec une inertie qui justifie cet éclairage spécifique.
- Des indicateurs assis sur la qualité des livraisons, qui intègrent évidemment les délais.
- Un indice de confiance, qui vient subjectivement évaluer l’engagement de notre partenaire à notre égard.
Comment pilotez-vous cette abondance d’indicateurs ?
Pour animer ce tableau de bord, nous utilisons deux outils :
- Le PCA Composants, dont la fonction est la maîtrise des risques attachés à 6 facteurs (les 6 M) : la Main d’œuvre, les Machines, la Matière, les Méthodes, le Milieu (l’environnement de production) et la Mesure.
- La revue annuelle des fournisseurs, au cours de laquelle nous partageons notre tableau de bord et convenons des améliorations à engager en priorité.
Le pilier de notre sécurisation est donc une proximité ancienne et vigilante avec un écosystème fidèle et engagé. Qui plus est en proximité géographique, en cohérence avec l’attention portée par Crossject à son ancrage régional. Au passage, cette fidélité assumée à des fournisseurs peu distants géographiquement s’est trouvée pleinement justifiée au plus fort de la pandémie de Covid, qui n’a que marginalement perturbé notre feuille de route.
Quels sont vos principaux points de vigilance pour 2023 ?
À présent que nous entrons en phase de vie série, nous ajoutons à ce pilier de stabilité une dynamique de compétitivité économique. À très court terme, pour travailler avec nos partenaires à un partage équitable des pressions inflationnistes. Pour l’avenir, en passant en revue avec créativité certains aspects de nos processus d’approvisionnement, comme la localisation des stocks ou les engagements de volumes.
Enfin, nous commençons bien sûr à anticiper des volumes sans commune mesure avec nos achats d’aujourd’hui. Pour lesquels un double voire un triple sourcing est inévitable à terme. Ce qui importe, c’est que nous restions fidèles à nos principes, en avançant de manière transparente avec nos partenaires historiques, que nous aidons le plus possible à monter en capacité, sans pour autant prendre des risques de dépendance.
Qui sont les personnes autour de vous ?
Pour associer fidélité à notre écosystème historique et audace pour continuer à grandir, notre équipe achats fait confiance à deux personnes, Fabien Pierre et Charline Troutier. Fabien est acheteur industriel, en première ligne sur la sécurisation de la supply chain. C’est lui notre poisson pilote pour identifier et référencer, les entreprises appelées à intégrer progressivement notre écosystème. Charline, quant à elle, est devenue il y a peu coordinatrice achats. Son rôle est d’animer la relation avec nos partenaires actuels, dont la fidélité et l’engagement à nos côtés sont déterminants. Un deuxième acheteur, en cours de recrutement, rejoindra l’équipe dès que possible.