Interview d'Olivier Giré, COO Crossject

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Quelle est l’importance du marché américain dans la stratégie de Crossject ?
Les États-Unis constituent pour Crossject une priorité en raison de la taille et de la valeur de ce marché. En effet, ce pays compte une population de 330 millions d’habitants, fonctionne avec un système de santé libéral prêt à récompenser par des prix élevés les innovations qui bénéficient aux patients et fait preuve d’une hypersensibilité aux risques de santé.  
Les États-Unis représentent, et de très loin, le pays de l’OCDE où la part des dépenses de santé est la plus forte, avec 17 %1, contre une moyenne de moins de 9 %1.

Comment abordez-vous le marché américain ?
Nous avons noué des contacts le plus tôt possible, et accéléré à partir de 2016 en nous appuyant sur des brokers.
En 2020, l’ouverture d’une filiale et le recrutement de Don Zinn, VP US Business, nous donnent les moyens d’une présence permanente. Don incarne la volonté de Crossject de s’investir à long terme sur le marché américain.   

Quelle a été la dynamique de ce marché en 2021 ?
Nous enregistrons en 2021 avec satisfaction une augmentation de l’intérêt autour de ZENEO®. La signature en juin de l’accord de licence ZENEO® Hydrocortisone avec Eton Pharmaceuticals intervient dans un contexte où se multiplient conversations et négociations. Le succès BARDA tout récent vient naturellement amplifier encore notre dynamique et notre visibilité américaine !

Quelles sont les pathologies priorisées par Crossject ? Et pourquoi ?

Nous avons priorisé 4 situations de crise, pour lesquelles la production de lots est la plus avancée.

L’insuffisance surrénalienne aigüe, prise en charge par ZENEO® Hydrocortisone, concerne un peu plus de 100 000 patients aux États-Unis. Ce médicament fait donc l’objet d’un accord de licence depuis juin 2021.   

L’allergie est un marché mature aux États-Unis, où l’on se préoccupe beaucoup plus qu’ailleurs des conséquences aiguës des réactions allergiques. C’est pourquoi les ventes d’auto-injecteurs sont 8 fois plus élevées sur le marché américain qu’au Royaume-Uni, le 2ème marché de l’OCDE. ZENEO® Adrenaline est indiqué sur cette pathologie.   

On dénombre aux États-Unis 3,5 millions de patients épileptiques, dont un quart sont sujets à des crises. ZENEO® Midazolam offre une solution d’urgence à ces 900 000 personnes chez qui la pathologie n’est pas stabilisée.

ZENEO® Midazolam enraye les crises épileptiques en provoquant un relâchement des muscles tétanisés. C’est pourquoi l’efficacité de notre médicament est également reconnue pour lutter contre les attaques chimiques. Des agences fédérales américaines comme la BARDA2 ou le DoD (Department of Defense) ont manifesté leur intérêt. Nous avons évidemment franchi un pas supplémentaire avec la BARDA en remportant son appel d’offres. 

Quel sera le deuxième volet de la stratégie américaine ?
Viennent ensuite 4 autres pathologies, pour lesquelles nos solutions ne seront opérationnelles que dans un deuxième temps.

On estime à 2 millions le nombre de personnes admises chaque année aux urgences en raison d’une crise d’asthme outre-Atlantique. ZENEO® Terbutaline est susceptible de réduire fortement cette affluence, en proposant une solution d’urgence auto-injectable.  

Sujet de société aux États-Unis, les surdoses aux opiacés provoquent 100 000 décès par an. En tant que réponse efficace en urgence, ZENEO® Naxolone a vocation à équiper l’entourage des patients reconnus comme à risques, ainsi que les espaces qu’ils fréquentent.
Enfin, nous ciblons le marché américain avec deux autres médicaments, ZENEO® Methotrexate, indiqué contre la polyarthrite rhumatoïde chronique, et ZENEO® Sumatriptan, efficace contre les fortes migraines.

Qui sont vos interlocuteurs sur le marché américain ?
Nous portons nos efforts auprès de 3 écosystèmes différents, pour lesquels les interlocuteurs, les enjeux et les modalités d’entrée en relation sont chaque fois spécifiques.

Le premier circuit de business development est celui des laboratoires pharmaceutiques. C’est avec eux que nous négocions des accords de licence, comme Eton Pharmaceuticals pour ZENEO® Hydrocortisone.

Le deuxième circuit est celui des agences fédérales. Nous avons besoin de leur appui pour crédibiliser nos différentes propositions. Les agences peuvent aussi être des interlocuteurs commerciaux. On le voit avec la BARDA et son appel d’offres sur lequel nous avons positionné ZENEO® Midazolam.

Enfin, nous entretenons des échanges continus avec les principaux fonds d’investissements américains fléchés sur la santé. Qu’ils aient déjà ou non choisi d’accompagner le développement de Crossject, il est important que nous soyons parfaitement identifiés par ces leaders d’opinion.

Quelles sont les particularités du marché américain par rapport au marché européen ?
Par rapport au marché européen, le marché américain présente l’avantage d’être homogène (comparé à un marché de 27 pays européens indépendants par exemple). Une autorisation de mise sur le marché vaut pour l’ensemble des 50 états ! Si les exigences réglementaires sont équivalentes sur les deux rives de l’Atlantique, l’efficacité est de ce point de vue côté américain.

Ce qui est vrai pour le circuit réglementaire ne l’est pas pour le circuit commercial. Il y a autant d’interlocuteurs que de payeurs privés ! Nos distributeurs ont à négocier un niveau de prix avec chaque assureur, en fonction du nombre d’assurés auxquels le référencement donne accès.

Côté assureurs santé publics, il y a moins d’acteurs mais il y a tout de même deux systèmes publics parallèles, l’un dédié aux seniors et l’autre aux personnes exclues du système de santé public en raison de la modicité de leurs revenus. 
Enfin, observons que les États-Unis partagent avec le Royaume-Uni et l’Allemagne l’avantage de pouvoir lancer une innovation avec des délais plus réduits que dans les pays du sud de l’Europe, France, Espagne ou Italie, où une année est en moyenne nécessaire entre l’obtention de l’AMM et l’apparition sur le marché.  

 

Zéro droits de douane
L’accès au marché américain n’est entravé ni par une exigence réglementaire qui serait inéquitable, ni par des droits de douane. De fait, les autorités de sûreté américaines et européennes abordent selon des philosophies très proches l’exigence de qualité et de fiabilité.
Ainsi, l’Europe est considérée par les États-Unis comme une zone de production fiable. Et il n’y a aucun droit de douane appliqué sur les médicaments produits en Europe à leur entrée sur le sol américain.

 

Olivier Giré, Chief Operating Officer Specialty Pharma de Crossject

 

1OCDE – 2018

2Biomedical Advanced Research and Development Authority, en charge des autorisations de mise sur le marché. Bureau du département américain de la santé en charge de l’acquisition et du développement de contre-mesures médicales, principalement contre le bioterrorisme, y compris les menaces chimiques, biologiques, radiologiques et nucléaires.